C'est une semaine exceptionnellement calme pour le service qui vient de s'écouler ...Elle m'a cependant permis de découvrir ce monde totalement inconnu pour moi. L'environnement du bloc opératoire ...
Le service urgences-chirurgie de l'Hôpital Français est un service un peu à part. D'abord parce qu'il occupe un bâtiment un peu en marge du reste de l'hôpital, loin des allées et venues des accompagnants, du personnel soignant, des garçons de service ou autres agents d'entretien.
Ensuite car il offre une sorte d'oasis aux médecins qui viennent fréquemment boire un petit café dans le salon dédié. Pause dont ils profitent pour discuter entre eux, mais aussi avec les infirmiers en service. Il y règne donc une bonne ambiance, plutôt décontractée. Comme le dit une infirmière, Miss Lamarre, "c'est comme si c'était notre maison".
Les salles d'opération, au nombre de trois, dont deux sont opérationnelles (problème de clim dans la troisième : Freeeed ! On a besoin de toi !), sont propres et très bien entretenues. L'une d'entre elles a même été conçue pour les étudiants en médecine. Elle est surplombée d'un mini-amphi théâtre aux vitres sans teint qui permet d'assister aux interventions.
Les salles d'op sont plutôt bien équipées. Les produits et petits matériels ne manquent pas. Tous les instruments sont stérilisés après utilisation dans un autoclave, après avoir été soigneusement empaquetés dans des tissus.
Miss Lamarre sort de l'autoclave les instruments,
compresses, tissus stérilisés ...
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Pour que les blocs soient opérationnels, un inventaire précis est réalisé chaque matin.
Petit matériel, médicaments de l'urgence, fournitures diverses et variées, doivent être en place en cas d'intervention prévue ou non prévue. Cela fait partie de la mission infirmière. Y compris celle de garantir une hygiène irréprochable. On passe donc une heure chaque matin à désinfecter les surfaces, murs, portes, tablettes et les appareils.
Comme je l'ai dit en introduction, la semaine a été calme. 5 interventions seulement. Je n'étais pas là pour 3 d'entre elles. Honnêtement je ne regrette pas d'avoir manqué l'orchidectomie. Et je pense que les hommes me comprendront lorsque Wikipédia les aura renseigné sur ce que c'est ...
En revanche, j'ai pu assister à deux reprises à des réfections de pansement sur une patiente dont l'histoire est un peu particulière ...
C'est une bouchère, qui en allant choisir sa viande s'est faîte chargée par un taureau. Soulevée à plusieurs mètres du sol, elle est retombée lourdement sur le sol et s'est ouverte le coude. Elle a décidé dans un premier temps de recourir à la médecine traditionnelle, ce qui est ici très fréquent. Les médecins eux-mêmes se soignent volontiers avec des méthodes empiriques, souvent des décoctions de feuilles possédant des vertus pour soulager maux de tête, maux de ventre etc ...
Notre bouchère a donc appliqué sur la plaie des feuilles aux vertus anti-inflammatoires reconnues, mais dont la particularité si on les laisse trop longtemps en contact avec la peau, est de "brûler" celle-ci. Ce qui s'est produit dans notre cas, provoquant une sur-infection de l'ensemble du bras.
Lorsqu'elle s'est enfin rendue à l'hôpital, son bras était tellement purulent, que le chirurgien a du lacérer la peau en plusieurs endroits afin de drainer le pus.
Lorsqu'on lui a enlevé le pansement et ignorant tout de cette histoire, j'ai d'abord cru, à la vue des profondes entailles, que cette femme avait été attaquée par un requin. Et en même temps, je n'arrivais pas à l'imaginer sur un surf en bermuda Hawaï ...
C'est le Dr Bazelais, directeur médical de l'hôpital et chirurgien, qui tout en nettoyant les plaies, m'a expliqué l'origine de ces lacérations. Et la méthode est efficace. Le pus ayant été évacué, les plaies vont pouvoir se refermer d'elles-mêmes, mais c'est quant même impressionnant.
3 jours plus tard, cette dame est revenue pour la même intervention. Lavage, débridement (on enlève les tissus morts pour favoriser la cicatrisation) et réfection de pansement. Cette fois-ci, une des plaies était investie de petits asticots, occupés à manger les tissus nécrosés. Cela arrive parfois mais n'est pas un problème en soi puisqu'ils participent eux-aussi à éliminer toutes les parties mortes. On commence d'ailleurs à utiliser cette technique en France et ailleurs pour accélérer la cicatrisation.
Cette intervention est beaucoup plus éprouvante pour la patiente. Plus douloureuse surtout. Le chirurgien lui a bien injecté au préalable un anesthésiant local autour de chaque coupure, rien y fait. Elle se tord de douleur et gémit. C'est assez difficile à supporter, y compris pour moi dans une moindre mesure bien sûr, et on se sent bien démuni ... Je ne trouve rien d'autre que de lui offrir ma main qu'elle serre désormais fort dans la sienne. Ce n'est déjà pas si mal, mais je me pose la question de la prise en charge de la douleur ici ...
Des éléments de réponse me sont donnés plus tard par le même médecin, Dr Bazelais, qui m'explique que d'une part cette patiente a déjà fait de mauvaises réactions aux anesthésiants, donc il ne préfère pas prendre de risques. Un autre raison est d'ordre financier. Cette patiente n'est pas assurée. Et chaque administration d'anesthésiant a un coût, qui viendrait se rajouter à la somme déjà considérable qu'elle a dû verser pour ces soins : environ 3000 € ...
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